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D-SIDE n°26 (janvier 2005)
interview : Jean-François Micard
Formation essentielle de la scène héxagonale apparue il y a près de vingt-cinq ans, Clair Obscur n'a jamais cessé de bousculer les relations entre musique et performance, entre scène et salle, entre chanson populaire et expérimentation, autour de l'hydre bifide constituée par Christophe et Nicolas Demarthe. Après une trop longue absence entrecoupée de quelques projets parallèles (CO2, Cocoon), Clair Obscur voit ressortir ses deux premiers albums In Out et Play sur le label parisien Infrastition et a décidé de revenir pour de bon en réinterrogeant son propre passé à grand renfort d'électronique froide claustrophobe. Un flashback qui fait froid dans le dos et que l'on peut d'ores et déjà découvrir en live, en attendant pour très bientôt un album tiré de cette expérience.
Clair Obscur est aujourd'hui de retour après de longues années d'absence, qu'est-ce qui vous a poussés à relancer le groupe ?
Christophe Demarthe : Cela faisait des mois que l'idée me travaillait : replonger dans la musique de Clair Obscur première époque. Etait-ce dû à un trop plein de musiques de confort, à la violence gouvernementale qu'on se prend dans la gueule ? J'avais besoin de radicalité, de retour à des compositions brutes, rugueuses. J'avais envie de réentendre et de réinterpréter ces titres du début du groupe. J'ai proposé l'idée à Nicolas en sachant qu'il était aujourd'hui loin de ces musiques. Il a pris le temps de la réflexion et puis il m'a dit : « D'accord». J'ai retravaillé les morceaux sur l'ordinateur, échantillonnant des éléments originels, refaçonnant des sons, travaillant des boucles rythmiques. Notre première répétition a eu lieu il y a tout juste un an. Ces titres que nous n'avions pas joués depuis quinze ans nous sont revenus incroyablement facilement dans les pattes. Ils ont tout de suite tourné. Nous avons réenregistré des voix, des guitares, des flûtes... Cela sonnait bien.
Sur ses derniers albums, Clair Obscur s'était distingué par l'alliance d'une section rock et de musiciens classiques. Cette formation sera-t-elle de retour dans le Clair Obscur 2005 ?
Pas vraiment puisque nous retravaillons surtout les premiers titres où nous n'étions que quatre. Nous travaillons l'aspect le plus brut de Clair Obscur donc une formation minimale, avec des sons basiques, froids, est ce qui convient le mieux. Ceci dit, rien n'est exclu pour la suite. Nous avons composé des uvres pour instruments classiques, les partitions existent, rien ne s'oppose à ce que ces uvres soient réinterprétées un jour...
Après la séparation de Clair Obscur, vous êtes réapparus sous le nom de CO2 pour un unique album. Pourquoi ce changement d'identité à l'époque et un retour a celle de Clair Obscur aujourd'hui ?
Entendons-nous bien : CO2, c'est Clair Obscur. Point. L'idée de changer de nom était une idée stupide, qui a germé chez nous à cause des éternelles réflexions que l'on entend dans notre beau pays lorsqu'on est un groupe qui existe depuis plus de dix ans : «Ah bon, ils existent encore ? Ils ne sont pas morts ?». C'était l'idée illusoire de nous refaire une virginité, de faire en sorte que les gens écoutent cette musique sans a priori. Bref, c'était une mauvaise idée.
Vos premiers albums, In Out et Play viennent d'être réédités chez Infrastition. Avez-vous eu un rôle à jouer quant à cette ressortie ?
Alex d'Infrastition nous a juste fait part de son envie de rééditer In Out et Play. Cela tombait bien puisque nous étions en train de lancer la reformation du groupe et qu'en plus nous travaillions surtout le répertoire de la première époque. Nous avons juste retouché les pochettes en nous rapprochant des pochettes vinyles originales.
Vous avez récemment commencé à rejouer en live sous l'identité de Clair Obscur. Quelle a été l'accueil lors de ces premiers concerts ?
Nous avons eu un premier retour du public à l'occasion d'une avant-première qui a eu lieu en comité très réduit en mars 2004. Les réactions ont été très chaleureuses, entre les gens qui nous connaissaient depuis toujours, ceux qui nous ont découverts plus tard, et enfin ceux qui nous découvraient ce soir-là. Ce concert a été le feu vert pour relancer la machine. Et puis il y a eu tout récemment le festival Heaven's Gate à Strasbourg, avec des réactions excellentes, des spectateurs de vingt ans qui connaissaient des morceaux qui ont leur âge, et les gens qui venaient nous voir après le concert pour nous dire combien ils avaient aimé.
Que peux-tu nous dire sur le nouvel album qui est annoncé prochainement?
Il sera très proche de ce que les gens entendront en concert. Il comprendra une douzaine de titres, une douzaine de réinterprétations couvrant la période 1981-1999.
A l'écoute des démos, on a l'impression que vous êtes dans une optique nettement plus pessimiste aujourd'hui qu'à l'époque...
Nous avons toutes les raisons d'être davantage pessimiste aujourd'hui qu'en 1981, année où tout semblait possible, non ? Il n'y a qu'à lire, par exemple, le livre d'Aurélie Filippetti, Les derniers Jours de la Classe ouvrière, paru en 2003, pour s'en persuader. En travaillant les vidéos pour notre set actuel, je me suis rendu compte qu'il y a un élément qui revient beaucoup sur différents titres : des murs.
Qu'en est-il de Cocoon, ton projet solo ? Comment s'inscrit-il par rapport à Clair Obscur, et penses-tu qu'il aura un avenir?
J'espère bien que Cocoon aura un avenir ! Pour l'instant, les choses se passent vraiment bien ; Cocoon suscite beaucoup d'intérêt. Pour moi, il y a un lien évident entre Clair Obscur et Cocoon, à la fois musicalement, dans une construction musicale dramaturgique, et dans les sets live de Cocoon, qui se déroulent avec la complicité du public.